Occupée hier à récolter les limaces
comme on cueille les fruits au verger
je te vois au pied de la margelle
seul attelé à ta vie : bouger
ton corps immense à l’échelle
de la coccinelle du scarabée
mais de l’arrière au front
bectable pour une pie.
Je dis aux autres venez, regardez
je veux célébrer ton apparition
comme on fête un rescapé
quelqu’un de rare en balade
au jardin du quotidien
dépourvu des bruits sourds
des hangars où tout s’arrête
mais où vit mon arbre mort.
Venez, regardez, il est là
Qui ? – Le Lucane cerf-volant.
Tes mandibules comme des bois
de cerf rouges, tu les brandis
bras au ciel où tu suspens
en l’air ton plan à suivre
trouver une femelle
du côté de l’arbre mort
où tu serreras la Grande Biche
où tous deux vous mourrez
où vos larves vivront six ans
où pousse déjà un sycomore.
Ton plan à suivre déjoue
le cul-de-sac inondé
de larmes où la barque
flotte d’une rive à l’autre